Pourquoi Madame Mirlande Manigat n'Ira Pas au Bureau de Contestation

Il est légitimement parvenu à Madame Mirlande Manigat des cris d’indignation de nombre de ses partisans et de citoyens honnêtes désireux de voir la politique se faire différemment en Haïti.

De nombreux compatriotes tant de l’étranger que du Pays s’insurgent contre ce coup fourré, et dans une démarche légaliste connue et conforme aux idéaux incarnés par le RDNP, s’attendent à  nous voir prendre et réclament même de nous, la voie de la contestation.

 

Effectivement, les faits, tels que connus, la porteraient à se présenter par devant le BCEN avec l’argumentaire suivant :

Les violations :

1.  L’article 122-2 de la loi électorale interdit toute manifestation  publique  en faveur d’un ou plusieurs candidats, d’un ou plusieurs partis, groupements ou regroupements  politiques le jour du scrutin et jusqu’à la  proclamation des résultats. La loi électorale prévoit une peine d’emprisonnement  et une amende de cinq mille (5000) à vingt cinq mille (25000) gourdes pour ce fait qui constitue un délit  électoral. Pourtant,  à Pétion ville, le jour des élections,  une véritable manifestation électorale a été organisée par le candidat à la présidence de Repons Peyizan, Joseph Michel Martelly, au moment de se rendre aux urnes. Cette manifestation publique au cours de laquelle une pluie de confettis à l’effigie de Martelly a été déferlée sur la foule des électeurs par l’équipe qui accompagnait le candidat aura déloyalement influencé le vote dans la commune de Pétion ville et même dans toute la zone métropolitaine. Surtout que la population la suivait en direct à travers certains medias (DVD disponible).

Des observateurs électoraux et des lecteurs inquiets ont dénoncé ce comportement illégal et aucun membre du CEP n’a réagi à ce délit électoral.

2.  Dans certains centres de vote des gens ont pu voter alors que leurs noms ne figuraient pas sur les listes électorales partielles correspondant à leurs bureaux de vote et sur les listes d’émargement appropriées.

Ce qui représente une violation flagrante de l’article 161 de la loi électorale.

3.  Les urnes ont été systématiquement bourrées par la machine frauduleuse mise en place par le camp adverse.  Les procès-verbaux de la grande majorité des bureaux de vote témoignent d’un nombre de bulletins dépassant largement le taux de participation de l’électorat. L’écart falaise constaté dans plusieurs arrondissements entre le taux de participation et les voix indiquées dans les procès-verbaux avaient porté les techniciens du Centre de Tabulation à  mettre le seuil de validation des PV à  100 voix. Pourtant, le président du CEP avec une complicité tentaculaire à décidé le jeudi 24 mars d’augmenter à 250 voix le seuil établi pour la validation de ces derniers et finalement à 300 (memo signé de M. Gaillod Dorsainvil annexé)

Le nombre de votants dépasse celui des inscrits dans la plupart des bureaux de vote et n’est pas en adéquation avec le taux de participation enregistré par exemple dans les départements du Nord, du Sud et de l’Ouest. (PV disponibles)

Ceci a été signalé dans un mémoire au CEP qui n’a pris aucune décision en ce sens.

4.  Les recommandations de l’OEA, appliquées au premier tour, permettaient la mise de coté des PV suspects ou atypiques.  Ces recommandations pour lesquelles le camp adverse s’est battu au premier tour par devant le BCEN pour en obtenir l’application, ont été systématiquement mises de coté à la dernière minute pour faciliter le forfait des membres du CEP. Ainsi au premier tour, tous les procès-verbaux témoignant  d’un bourrage d’urnes ou  présentant des éléments frauduleux n’avaient-ils pas été écartés? C’est d’ailleurs la seule explication à la présence de  M. Michel Martelly au second tour en lieu et place de M. Jude Célestin.  

Ceci est un indicateur sans équivoque de la machination du CEP et de la partialité de l’OEA qui a choisi délibérément de ne pas réagir à la violation des règlements mis en place.

5.  Une délégation du CEP présidée par M. Gaillod Dorsainvil accompagné d’autres conseillers, s’est rendue le  dimanche 3 avril à deux reprises, et la dernière, en pleine nuit, pour  faire comptabiliser les procès verbaux annulés par le Centre de Tabulation, en faisant fi des recommandations de l’OEA appliquées au premier tour.  Nous disposons de la liste de ces procès-verbaux.

Or, l’article 174 de la loi électorale établit, sans équivoque, que seul le Directeur Général du CEP joue le rôle d’intermédiaire entre le  Centre de Tabulation et les membres du CEP. Plus loin, l’article précise : « Au besoin, après  le traitement des données et avant la proclamation des résultats, les partis politiques et les candidats indépendants participant aux élections ont accès au Centre de Tabulation pour vérification ».

Il est clair que c’est une énumération limitative qui ne permet pas aux membres du CEP de participer au processus de traitement des données, ce qui rend leur présence dans l’enceinte du Centre de Tabulation la nuit du 3 avril pour le moins insolite (reportage radio Scoop FM et interview du lendemain sur Radio Vision 2000).

Qu’ont fait M. Dorsainvil et ses acolytes au Centre de Tabulation pendant ces deux heures qu’ils y ont passé, alors que les informations reçues dans l’après midi, avant leur intrusion, annonçait déjà la victoire de Mirlande H. Manigat?

Il est évident que tous ces faits prouvés sont d’une telle gravité qu’ils vicient les résultats des élections et que conformément aux prescrits de l’art. 179 de la loi Electorale nous serions en droit de produire une contestation légale qui serait recevable tant en la forme qu’au fond.

Qu’il soit clair et sans équivoque pour tous que ce n’est ni par défaitisme, ni par manque d’arguments que le RDNP et alliés choisissent de ne pas emprunter la voie de la contestation formelle. Ce n’est pas non plus par découragement, l’équipe constituée est de la race des lutteurs infatigables.  La vie du RDNP pendant plus de trente ans est jalonnée de combats livrés debout, les armes à la main, les bonnes, c'est-à-dire les lois, les idéaux démocratiques et les valeurs républicaines.

Mais qu’on le comprenne bien, ce combat mené par les membres du CEP et certains acteurs nationaux et internationaux  n’est pas celui du droit et de la démocratie.  Il n’a pas échappé à la sagacité de tous que ce qui se jouait après que les décomptes aient donné gagnante Madame Mirlande Hyppolite Manigat, était le jeu immonde et immoral de la surenchère.

Nous sommes conscients et convaincus que, comme l’ont souligné les plaideurs de Racine : « …après maints compulsoires, procès-verbaux et pour quelques [dollars] de plus on obtiendrait aisément quelque jugement sur requête ». Ne parle-t-on pas de la rançon de l’infamie: trois millions de dollars américains et la promesse d’un portefeuille ministériel ( ?...).

Pour toutes ces raisons et à cause de :

a) la composition du BCEN formé de ceux-là même qui ont enfreint la loi électorale, qu’ils avaient pourtant juré de faire respecter ;

b) la passivité de l’OEA qui, contrairement au premier tour, n’a pas réagi aux violations des recommandations qu’elle avait elle-même proposées ;

c) l’intoxication d’une certaine Communauté Nationale et Internationale prévoyant un éventuel bain de sang selon les résultats, ce  qui offre une prime à la violence, monnaie d’échange dont on veut faire une constante dans la politique haïtienne.

Et surtout par pragmatisme et réalisme, car par devant ces juges, ce ne sont point les arguments de fait et de droit qui triomphent mais encore la valse effrénée des dollars et de la surenchère. Or , nous n’avons ni les moyens pécuniaires, ni la culture de cette pratique immorale contre laquelle nous n’avons jamais tergiversé.

Madame Mirlande Manigat ne se présentera pas par-devant le Bureau du Contentieux Electoral ; elle choisit plutôt de dénoncer à la nation les turpitudes et les vilenies de ces conseillers électoraux noctambules. Elle espère, mais sans trop d’illusion,  que  chacun assumera ses responsabilités devant l’Histoire, tout en souhaitant le meilleur pour Haïti.

Par:
André Michel, av.
Wilmine Raymond Saint-Pierre, av.

Carol Chalmers, av.